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Le plus ardant de tous les Elemens
N'est si bouillant, alors que le Soleil,
Au fort d'esté le fier Lyon enflame,
Comme ie sens aux doux trets de ton oeil,
Estre enflammée & bouillante mon ame:
Le triste corps languissant en tourmens.

A ces piteux travaux, à ces tourmens,
N'ont les hauts Cieux, & moins les Elemens,
Fait incliner, ou descendre mon ame:
Mais, comme on voit les rayons du Soleil
Eschauffer tout çà bas, ainsi ton oeil
Rouant sur moi de plus en plus m'enflame.

Ie voy souvent Amour, lequel enflame,
Pour me donner plus gracieux tourmens,
Ser trets cuisans en ton flamboyant oeil:
Lors memuant en deux purs elemens,
Le corps se fond en pleurs, quand ce Soleil
Empraint le feu plus ardemment en l'ame.

Vienne secher toute langoureuse ame,
(Si comme moy Amour trop fort l'enflame)
Ses tristes pleurs, aux rais de mon Soleil.
Vienne celuy, qui, comblé de tourmens,
Se pleint de Dieu, du Ciel, des Elemens,
Chercher confort au doux tret de cest oeil,

Le doux regard, ou fier tret de cest oeil
Fait ou ioyeuse, ou dolente toute ame,
Et temperez, ou non, les Elemens:
Außi c'est luy, qui rend froide, ou enflame,
L'occasion de tous ces miens tourmens,
Et qui m'est nuict obscure, ou cler Soleil.

Fuyant le iour de ce mien beau Soleil,
Tout m'est obscur, & rien ne voit mon oeil,
Que dueil, ennui, & funebres tourmens:
Tourmens si grands, que ma douloureuse ame
Meut à pitié le Dieu, qui tant m'enflame,
Mesme le Ciel, & tous les Elemens.

Plustost ne soit resoult en Elemens
Ce corps, ny l'ame au Ciel sur le Soleil
Puisse saillir, que doux ne me soit l'oeil,
Lequel m'enflame, & me tient en tourmens.